Au fil de l’eau

Dans la phrase : « Je prends une année sabbatique « , il y a plusieurs points importants.
« Je prends » : Dans l’idée, ça veut dire que t’as pas le choix, ma décision est prise ! Selon, l’interlocuteur que vous avez en face, soit vous faites forte impression (« wouaw, ok, vas-y prend ! je peux rien faire la ! ») soit vous redevenez un petit enfant (« vas-y, tente pour voir mais je te préviens, je réponds pas de moi !).

« Une année » : 365,25 jours, 8766 heures, 525 960 minutes et 31 557 600 secondes. Largement de quoi faire un môme, construire une maison, ou avoir 12 cm de cheveux en plus. Le temps est une valeur essentiel dont nous manquons presque tous, pour faire tout ce que nous voudrions faire. Il faut dire que bosser 8h par jour pour avoir les moyens d’occuper le temps qu’on a plus, c’est comme avancer à reculons. C’est con.

« Sabbatique » : Le mot ressemble trop à sympathique pour que ca soit une coïncidence si vous voulez mon avis. Wikitionnaire nous dit : Du latin chrétien (annus) sabbaticus, « (an) sabbatique ». L’année sabbatique se pratiquait chez les anciens Hébreux conformément au Deutéronome 15, 1-11 : chaque septième année, les terres se reposaient et le produit en était laissé aux pauvres.
Je l’ai pris au pied de la lettre mais ne sachant pas compter, c’est après 7 ans de travail que je me met en jachère (façon de parler). Si vous êtes pauvres, n’espérer rien de moi non plus (je vous vois déjà venir).

Si on rassemble tout, on voit bien que j’ai décidé de prendre du temps pour me reposer. Afin d’occuper ce temps, j’ai fait le choix de marcher le plus possible plutôt que de prendre les transports en commun. C’est bon pour la santé et on voit la ville sous un autre angle (en plus de faire des économies)
Mercredi dernier, j’ai voulu voir par moi-même, un type de lieu que j’ai souvent vu dans les dramas, ces séries télé japonaises. Je veux parler des berges de cour d’eau, aménagées en sentiers piétonniers, pistes cyclables, avec des terrains de baseball et de foot pour les écoles et les clubs. Ces lieux ou la vie parait ralentir, ou les familles passent du bon temps ensemble autour d’un bentô, un week-end ensoleillé.

Un coup d’oeil sur une carte et mon itinéraire est fait. Car j’ai la chance d’avoir un cour d’eau « pas loin » (ah ah ah ) et ce type d’aménagement apparait clairement sur la carte. J’ai appris par l’expérience qu’il fait toujours regarder l’échelle d’une carte avant de prévoir un parcours. Encore faut-il avoir une idée des distances que cela représente dans la vie.

1. Mairie du quartier
2. Mairie principale

N’ayant pas fait de photo de mon parcours à la mairie, je décide de repasser par la et de rattraper ainsi cette erreur. Ce fut long. 3 h au total pour faire cette boucle. Je vous passe mes déambulations dans cette partie de la banlieue de tokyo pour aller directement au plus important. Les berges.

Je crois que je n’ai pas choisi le bon coin. C’est un peu comme si on vous montrait les plages de Martinique et qu’en étant en France, vous décidiez d’aller à Dunkerque, car après tout, c’est une plage aussi. Alors la plage de Dunkerque, ça sera bien, mais c’est pas la Martinique. La, c’était pareil. Des berges aménagées sur fond d’échangeur autoroutier, de décheterie et HLM. Loin de l’image que j’en avais vu mais assez inhabituel par rapport aux paysages occidentaux.

J’ai tenté, malgré le manque flagrant d’intéret du lieu, de « rentabiliser » l’énergie qu’il m’avait fallu pour venir, en prenant de « bonnes photos ». Quand on me demandait, avant mon départ, ce que je ferai une fois sur place, je répondais de manière très sùr de moi : « je vais faire de la photo, un peu de vidéo », alors qu’intérieurement c’était plus : « mais j’en sais rien ce que je ferai ! j’ai un an ! un an putain !! je me baladerai avec mon appareil photo et je verrai bien merde ! ». J’ai donc joué aux photographes, avec un sujet qui ne m’inspirait pas du tout, sinon ça serait trop facile.