Aujourd’hui, mon ami « le belge » a émis une remarque particulièrement pertinente. Ce n’est pas la première bien sûr mais celle-là mérite d’être partagée car elle correspond parfaitement à la journée que vous allez vivre : quand on visite le Japon, il est difficile d’avoir une cohérence, un thème, une continuité dans ses visites. Exemple live !
Nokogiri-yama doit faire partie de vos visites. Oui, je commence par la conclusion de cette promenade mais comme ça au moins, vous ne serez pas surpris par mon utilisation de superlatif à outrance et par mon entrain. C’est sans doute le moins connu des lieux que j’ai visités, si on met de coté Himi et ses alentours parce que c’est un peu cheaté comme patelin. C’est bien simple, je n’en avais jamais entendu parler avant que Kanpai fasse un article dessus. Et pourtant, je perds pas mal de temps à chercher des idées de visite et à fouiller l’internet moderne. Si j’étais déjà convaincu de devoir y trainer mes guêtres, un article sur le blog de mon ami Linksky m’a poussé à le faire vite pendant que « le belge » était là.
J’ai la chance, façon de parler, de vivre dans la grande banlieue de Tokyo, à 10 minutes en métro de Chiba. Et c’est un avantage pour cette sortie car la ligne de train à prendre pour aller dans ce paradis pédestre part de Chiba. Il faut précisément 88 minutes depuis Chiba, ce qui fait au total près de 2h30 de voyage si on rajoute les 50 minutes entre Tokyo et Chiba. C’est pas à côté donc ! La gare d’Hamakanaya est dans un petit village de pêcheurs un peu paumé et super calme. On se croirait super loin de tout et… bah c’est le cas en fait. Une route, trois restaurants et au bord de l’eau, de la musique parvient jusqu’à nos esgourdes. De loin, on dirait un petit festival mais on a pas le temps pour ça, on a de la marche dans la montagne à faire. Mais après avoir pris le téléphérique. Je sais ce qui nous attend là-haut alors on va pas faire les malins à commencer la grimpette de si bas.
Par contre première surprise, pas forcément bonne mais pas catastrophique non plus : on est pas seuls. J’avais lu que le lieu n’était pas très connu et pas encore trop touristique. Mais on est samedi. Et le samedi, il y a des cars de touristes japonais et des sorties scolaires. On s’en accommodera mais c’est raté pour le délire « découverte de ruines dans la jungle ». On attend donc notre tour derrière les touristes pour aller s’entasser dans la cabine qui nous emportera vers le sommet de la montagne.
Parlons-en du sommet. En s’approchant du terminus, on se rend compte que la montagne a été taillée, la rendant parfaitement verticale, avec de grandes ouvertures rectangulaires. Un travail de titan qui ne date pas de la construction du téléphérique. J’imagine mal le temps et l’installation qu’il a fallu pour faire ça. Et je vois encore moins l’intérêt de la chose. Le toit de la station de téléphérique sert d’observatoire, premier contact avec la vue imprenable qu’on a raté pendant l’ascension à cause de la cabine blindée.
Fini l’apéritif, passons au plat principal : l’enceinte historique de Nokogiri-yama, le bien nommé kenkon-zan nihon-ji. Facile à retenir. Je dis historique parce que c’est le cas. L’ensemble a été construit, taillé et façonné il y a 1 300 ans de ça, en juin 725 pour être précis. Je crois même que c’était un jeudi, il faisait beau. La promenade que vous effectuerez dans ce complexe vous ramènera forcément dans cette époque lointaine, même sans trop d’imagination. Dès le début de la visite, vous avez le choix entre plusieurs chemins : ça monte, ça va tout droit ou ça descend. Ouais, c’est un peu à vous de choisir votre parcours et vous serez content d’avoir le plan généreusement donné à l’entrée.
Sur tout le domaine, il y a de nombreuses choses à voir et en planifiant un bon parcours, vous pourrez tout voir sans trop perdre de temps et d’énergie. Ouais, de l’énergie. J’ai beau être jeune et dans la force de l’âge, quand on m’annonce qu’il y a bien 2 600 marches sur l’ensemble des sentiers, je me dis que moins j’en grimperai, mieux je me porterai. C’est dans cette optique qu’on monte direct ! On est des fous, on a pas peur. On est surtout dégoutés parce qu’après avoir grimpé une bonne centaine de marches, on découvre un lieu totalement sans intérêt si ce n’est pour la vue. On vient de la voir il y a 5 minutes cette vue donc excusez la déception de ne retrouver que ça ici.
Pas grave, on dira que c’était l’échauffement, le premier contact avec la nature sauvage qui nous entoure. Car sauvage est le mot approprié. Si les chemins sont bétonnés, ce n’est pas choquant quand tout le reste est laissé aux bons soins de dame nature. C’est la jungle ! Très vite, on se croit arrivés dans un décors d’Indiana Jones ou de Tomb Raider. Quand on voit ça, l’imagination s’emballe ! Pour peu qu’il y ait du silence et que vous soyez seul, vous n’aurez aucun mal à vous faire votre film. J’adore cette ambiance !
Au bout de ce chenal de verdure, la première merveille de la journée nous attend, immobile depuis toujours et majestueuse depuis que l’homme l’a façonnée. Ah non, je vous garantis que ça, c’est pas la nature qui l’a faite.
On est dans la jungle perdue et on tombe sur cette sculpture de Hyakushaku-Kannon (30 mètres de haut). Si il n’y avait pas ces touristes autour de nous, l’impression de découverte et d’aventure serait encore plus forte. Et déjà, on est impressionnés par la taille et l’ampleur de ce qu’on a sous les yeux. Je vais me répéter mais comment ont-ils pu sculpter ça et en combien de temps ? C’est dingue ! C’est vraiment le genre de création humaine qui m’impressionne car même si ça dénature un lieu qui devait être très beau au naturel, je trouve que ça lui donne une âme et une histoire. Et nous pauvres badauds, on arrive pour être les spectateurs de cette part d’histoire. J’ai eu beau chercher un mécanisme secret qui ouvrirait un passage secret, j’ai rien trouvé.
Mais nous avons encore d’autres endroits intéressants à voir et encore beaucoup de marches à grimper ! Une petite série nous mène au point le plus haut de la montagne. Un observatoire moche en béton trône là et si son esthétisme est douteux, son utilité est prouvée. Il permet de prendre de belles photos de la mer verte en contre-bas et du point d’observation, plus avancé sur la falaise en face. Cette petite pointe de roche qui défie le vide est accessible aux plus téméraires et à ceux qui aiment un peu grimper. Point d’escalier pour y accéder, juste des marches plus que rudimentaires. Là-haut, il ne faut pas avoir le vertige. Parce que c’est haut, très haut. Les photos ne rendent pas hommage à cette sensation de vide et de chute. Mais la vue vaut le détour !
Le belge a le vertige rien qu’en voyant les photos. Alors on continue notre balade, le sourire aux lèvres sachant que les marches seront dorénavant nos amies. On va les descendre et même si c’est moins physique que la grimpette, être toujours sur le frein fatigue mes petites cuisses.
Une bonne partie de notre balade sera une alternance de marches et de petites cavités remplies de statues, représentations de disciples de Bouddha. Sur les 1 500 disponibles, vous en trouverez forcément une qui vous plaira sachant qu’il n’y en a pas deux pareilles. Enfin, quand elles ont encore un visage. Le bouddhisme n’a pas toujours été super populaire et pendant l’ère Meiji, le sport national était la décapitation de statue. Celles-ci en gardent encore des traces même si les têtes ont été recollées.
On a bien pris notre temps à serpenter à droite et à gauche afin de ne rien rater de notre visite. Mais l’heure est venue d’aller voir la pièce maîtresse, tant en taille qu’en symbolique : le bouddha géant de 31 mètres. J’ai déjà vu les 3 plus grands bouddhas de bronze du Japon alors niveau gigantisme, j’ai eu ma dose. Mais celui-là, en pierre, est vraiment balaise. Et encore, il paraitrait plus grand s’il n’était pas perdu au milieu de la nature. Ça n’aide pas à bien appréhender sa taille. Le manque de point de comparaison fausse la perception. Il a eu quelques soucis semblerait-il quand on voit les cicatrices sur son visage et son torse malgré sa restauration. La pierre vieillit moins bien que le bronze dans un pays secoué régulièrement pas la terre capricieuse.
Bon, on est bientôt au point le plus bas du sanctuaire et on doit presque tout remonter pour retourner au téléphérique. On va moins rigoler maintenant, surtout qu’il fait chaud ! Oui, on se plaint de la chaleur alors qu’en France il fait 12°C. On est français et jamais contents, vous devriez le savoir nan ? On a transpiré, on a été essoufflé, on a bavé (les jupettes, toussa toussa), on a rigolé en voyant que tout le monde était dans le même état mais au final, on les a niquées ces foutues marches ! Elles se vengeront demain matin au réveil, j’en suis sûr, mais sur le moment, on s’en fout. On reprend le téléphérique et direction la gare ou le train arrivera… dans 40 minutes. Saleté de campagne.
Vu qu’on a le temps, on va voir ce qu’était le festival qu’on a entendu en arrivant. Et là, on commence à illustrer ce que je vous disais en introduction. Quant on visite le Japon, on passe du coq à l’âne constamment dans une même journée. Nous arrivons en plein mini festival hippie. Un groupe joue, des stands sont disposés en cercle, les gens dansent sans décoller les pieds, bière à la main et fringues bariolées. C’est super cool, sérieux ! La musique est bonne, les gens semblent plus que détendus et comme j’ai mis une chemise à fleur trop (pas) classe, je suis trop dans le thème ! Si on était restés, on se serait fait des potes je suis sûr.
Mais l’heure tourne et le train arrive pour nous emmener vers quelque chose de totalement différent. On va à Asakusa \o/ Je sais, ce quartier me saoule, je l’ai encore dit quand je suis allé au Sanja matsuri, mais comme pour le Sanja matsuri, j’ai une raison de venir ici ce soir à la tombée de la nuit.
Ce soir, pour la deuxième année, se déroule sur la rivière Sumida le Tokyo Hotaru Festival. Quel joli nom pour un joli festival ! On est au pays de la contemplation alors quand un festival s’appelle le festival des lucioles, on s’attend à voir de la beauté et de la lumière. Ne rêvez pas, y’a pas de luciole ici. A défaut de faire un lâché d’insectes (qui serait sans doute très joli), les organisateurs ont imaginé quelque chose de moins pénible à faire mais tout aussi impressionnant. Et plus lucratif malheureusement. L’idée est de transformer la rivière Sumida en rivière lumineuse, à l’aide de dizaines de milliers de diodes flottantes bleues.
Imaginez une rivière recouverte de diodes bleues, flottant au gré du courant, illuminant bateaux, berges et ponts, rythmant le temps qui passe et symbolisant l’éphémère et le fragile. On est dans la même veine que l’observation des cerisiers en fleur. A la différence près que pour regarder les cerisiers en gros plan, c’est gratuit.
Je vous ai parlé d’un festival lucratif et c’est un peu mon souci. Les diodes qui sont mises à l’eau ne sont pas gratuites. Ce sont des gens qui les ont achetées via le site internet du festival. Mais comment convaincre les gens de payer pour quelque chose d’aussi éphémère ? Bon, payer 1 000 yens pour une loupiote, ça va, c’est pas la mort et ça participe au spectacle. Ça doit largement payer l’objet et faire un peu de bénéfice au passage. Mais c’est pas suffisant. Pour faire vraiment de l’argent, ils ont fait un ticket à 3 000 yens. Ce ticket vous paye une loupiote (Led rechargeable au soleil) et vous donne le droit d’accéder au plus près du festival, c’est à dire sur les berges de la rivière Sumida. Vous avez bien lu, les berges sont payantes le soir du festival.
Et ça fout la merde ! Les pauvres s’agglutinent sur les ponts et le long des zones payantes, on se bat pour circuler et on voit pas si bien que ça ce qu’il se passe sur la rivière. Pourtant, le spectacle est très joli. On a envie de s’installer au bord de l’eau et de contempler tranquillement ces petites lucioles high-tech. Et c’est le but ! Nous donner envie de payer pour être mieux installés. C’est sournois !
Pas facile de prendre de belles photos au-dessus de la foule, à 50 mètres de l’eau. Mais quand on veut pas rentrer dans le jeu des riches contre les pauvres, on subit les règles. On a quand même profité mais sans s’éterniser. En partant, on voit les bateaux qui commencent à repêcher les boules avec leurs épuisettes. Bon courage les gars, il n’en reste que 98 000 ! Un petit tour au temple d’Asakusa pour le montrer au Belge et nous étions rentrés dans notre maison.
En résumé, on est passé de la jungle perdue au festival hippie avant d’aller à un festival de lucioles et pour finir dans un temple. Difficile de faire plus varié et c’est très souvent comme ça que se déroule une journée de visite ou de promenade au Japon. Planifiez des visites mais laissez-vous surprendre par l’imprévu !
2 Réponses
Skaree
a kita-shinagawa tu as festival qui commence si tu veux ,du 5 au 8 je crois
albatruc
un peu tard, je suis à okinawa jusqu’au 14