Hama-rikyu

Classé dans : Tokyo | 1

L’inconvénient d’être un touriste longue durée et de rester un peu trop longtemps au même endroit, c’est qu’on en arrive à tourner en rond. On a la fausse impression d’avoir tout vu et trouver de nouvelles visites devient de plus en plus dur. J’avoue que c’est quand même un inconvénient de gros bourgeois. Mon dieu, qu’est ce que je vais faire à Tokyo demain, moi qui connais si bien la ville et qui ne suis plus surpris de rien. Mon pauvre chou, on va te pleurer !

Ouais bah excusez-moi d’être en rade d’idées ! Surtout que sans mon colocataire « le belge », je me retiens de faire certaines visites qui peuvent l’intéresser. Du coup, le choix des possibles est restreint et l’envie de glander chez moi devant des séries ou Starcraft 2 est grande ! Mais non ! Il ne faut pas sombrer dans cet abime de faiblesse douillette et moelleuse qui m’appelle. Je dois me bouger le cul et… prendre ma douche parce qu’il est déjà midi quand même.

Le temps est couvert mais chaud, une bonne chose si je veux rester dehors. Après quelques recherches rapides, je tombe sur un endroit assez peu mis en avant dans les guides touristiques. Ça ne m’étonne qu’à moitié en fait car les parcs et jardins de Tokyo sont assez nombreux et les plus célèbres prennent la place des moins connus dans l’agenda des touristes. Le jardin du palais impérial ou le parc d’Ueno sont plus vendeurs que le jardin Hama-rikyu. Vous n’en avez jamais entendu parler n’est-ce pas ? Non, là je ne m’adresse pas à toi, néophyte du Japon mais bien à toi, habitué de cette contrée sauvagement urbaine.

Je t’en veux pas, moi non plus je ne le connaissais pas. Pourtant, je suis passé pas loin des dizaines de fois, sans jamais soupçonner son existence. Coincé entre les tours de Shimbashi et la baie de Tokyo, c’est pourtant un vaste espace de verdure largement visible si on prend la peine de regarder un plan de la ville. Mais une fois dans le monde réel, les buildings le cachent véritablement, si bien qu’il est presque impossible de tomber dessus par hasard. C’est bien dommage car il mérite au moins une petite balade.

Je vous le dis de suite, c’est pas le parc qui vous fera pétiller les yeux et vous transporter dans les limbes du plaisir orgasmique que seule la vision sauvage d’une nature maîtrisée peut vous faire ressentir. Ça veut rien dire mais je trouvais ça beau. Non, c’est juste une balade sympathique dans un parc sympathique. A la base, je voulais y aller pour m’installer dans un coin et lire tranquillement après avoir fait le tour réglementaire du lieu. Dans les faits, j’ai fait mon tour et le parc allait fermer.

Faut dire que je ne suis pas arrivé en avance, sur les coups de 15h à peu près. Le parc est payant mais je doute que 300 yens vous manquent tant que ça alors que vous en avez dépensé des milliers en conneries diverses ! Pensez aux emplois que vous créez au Japon en payant cette entrée ! Chose assez rare pour être soulignée, on me propose à l’entrée une brochure en anglais ou français et surtout un audio guide gratuit. Je m’en suis passé car j’ai pas pour but de connaître l’histoire du lieu. Mais la démarche est louable !

Et contrairement à moi, vous vous intéresserez peut-être aux explications historiques de chaque bosquet, de chaque zone ou de chaque pont qui parsème ce grand espace de calme. Je vais donc vous la raconter subrepticement, parce que j’ai quand même un peu lu la brochure. C’est comme souvent, un gros caprice de bourgeois féodal qui donna naissance à ce parc. A la base une annexe du château d’Edo, il est en 1654 agrandi par Matsudaira Tsunashige pour gagner sur la mer. Il souhaite y faire construire une villa secondaire, le bougre. A travers les âges, il est passé de main en main en restant presque inchangé. Seul le grand tremblement de terre du Kanto et la seconde guerre mondiale ont eu raison de lui mais après la guerre et une remise en état par l’État (c’est drôle) qui en a hérité, il est ouvert au public.

C’est un parc intéressant car l’eau y est omniprésente. Comme il est construit sur la mer, une partie des bassins est rythmée par le cours des marées et donne un peu de vie à des plans d’eau habituellement très…statiques. On a beau dire mais un lac ou un étang, c’est chiant comme la mort. Un peu de mouvement et de marée, c’est quand même plus fun ! J’ai pas besoin de faire beaucoup de marche pour comprendre à quoi servent mes 300 yens d’entrée. En effet, c’est pour créer des emplois. Des emplois de tailleurs d’arbre et d’arracheurs de mauvaises herbes dans les pelouses.

Vous avez bien lu, ces gens à quatre pattes dans la pelouse « s’amusent » à arracher les mauvaises herbes une par une. C’est sûr que le résultat est super classe et super propre. C’est pas Versailles mais ça a du cachet quand même. Le seul souci, c’est que c’est long et que vu la surface du parc, il ne seront pas arrivés au tiers qu’il faudra recommencer du début. D’ailleurs, plus on s’éloigne de l’entrée et moins les espaces verts sont entretenus. On se retrouve avec un dégradé de propre vers du sauvage, de l’entrée vers la mer. C’est original mais ça ne plaira pas à tout le monde.

Très vite, j’arrive au plan d’eau principal, surplombé par un petit pont de bois fraichement rénové et sa maison de thé. Je regrette que le ciel soit couvert, le paysage aurait été moins triste avec un peu plus de chaleur à l’image.

Une fois ce lac d’eau de mer franchi, on est dans un « no man’s land » végétal. Partouze de trèfles et d’herbes folles partout, chemin encore boueux des pluies de la veille et littoral assez moche. Je m’imaginais une vue sympa sur la baie de Tokyo mais on en est quand même loin. C’est la partie décevante du parc cette vue. Ne venez pas pour ça et préférez-lui un tour à Odaiba où vous aurez tout le loisir d’admirer le Rainbow bridge et les pétroliers.

Je continue ma petite balade en passant par le bois d’abricotiers du Japon où un chat snobe nonchalamment les touristes avant de revenir vers le champs de peonia suffruticosa. Vous ne savez pas ce que c’est j’imagine. Moi non plus. Mais ça doit être ça :

Ça manque de couleurs et de fleurs malheureusement. Qu’à cela ne tienne, il y a à coté un « champs de fleurs » d’après le plan. Je vois bien le champs, pas de soucis. Par contre, je cherche encore les fleurs. Moi qui pensais qu’au printemps, ce genre d’endroit serait fleuri… Ma naïveté me perdra !

En prenant mon temps, c’est à dire en marchant lentement et en prenant le temps de faire des photos, j’ai mis presque 1h30 pour faire toute la visite. Il me reste juste de quoi lire dans un coin avant que les hauts parleurs nous invitent à déserter le lieu. Et oui, c’est comme les temples, à 17h tout le monde dégage. L’éclairage, ça coûte cher alors n’espérez pas profiter de l’ambiance nocturne. Allez plutôt faire un tour à Ginza tout proche pour finir la journée et pourquoi pas pousser vers la gare de Tokyo, les ruelles de Kanda avant de vous arrêtez à Akihabara. C’est ce que j’ai fait en 1h30, le temps de faire les boutiques et de prendre mon temps.

Une après-midi rempli alors que je pensais ne rien faire du tout. Le privilège d’avoir du temps quoi.

 

Une Réponse

  1. Le fait que les parcs soient moins entretenus au fur et à mesure qu’on s’éloigne, c’est assez commun. Par exemple à Versailles c’est aussi le cas. Au début c’est tondu à la main, puis à la tondeuse, puis au tracteur et ensuite ce sont de moutons. C’est la nouvelle « mode » pour donner un style vivant campagnard mais aussi pour faire des économies.

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