The Power of Manga

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J’ai été au musée. Si si je vous jure, s’pas une blague. Un vrai musée avec des expositions, permanentes et temporaires, avec des vraies œuvres et des vrais gens pour regarder. J’ai même payé pour ça. C’est vous dire si ce qu’il y avait à voir devait me plaire ! Ou en tout cas, susciter chez moi assez de curiosité pour m’obliger à franchir le pas de ce genre d’établissement.

Certains noms sont si fort qu’ils sont connus bien au-delà de leur sphère d’influence. Pas besoin de faire de la musique ou de s’y intéresser pour connaître l’importance de Mozart par exemple. De même que Hitchcock est célèbre en dehors de la sphère des cinéphiles. Ce n’est pas sans raison que ces personnes ont transcendé leur domaine pour être porté plus haut, plus loin mais bien parce qu’ils ont marqué leur époque, leur genre et leur domaine, chacun à leur façon. Ils ont laissé une emprunte grâce à leur talent et aujourd’hui, chacun est en mesure de les citer en sachant l’importance qu’ils ont eu.

Pour la musique et le cinéma, c’est facile. Mais si vous deviez citer un ou deux noms de mangakas ayant la même aura, la même importance, quels noms vous viendrait en tête ? Les plus jeunes citeraient sans doute Akira Toriyama et je ne leur en voudrais pas mais… sans vouloir vous offenser les enfants, Toriyama n’a rien révolutionné. Pour les plus féru de ce média par contre, nul doute qu’Osamu Tezuka et Shotaro Ishinomori viendraient en tête (et comme vous le verrez, ils n’ont pas bouleversé que le manga, loin de là)

Tant mieux car c’est une exposition qui leur est consacrée que je suis allé voir au musée d’art contemporain de Tokyo. J’aime lire des mangas mais j’admets bien volontier ma totale ignorance en matière d’histoire du manga, la preuve en est que Shotaro Ishinomori m’était totalement inconnu avant de voir l’expo, où forcement je me suis dit : « ah mais ouiiiiii c’est lui qui a fait çaaaaaaaa ! »

Présentation des messieurs avant de parler de l’exposition.

Osamu Tezuka est né le 3 novembre 1928 à… nan mais ça va être chiant et ça va vite me gonfler ce ton accadémique à la con. Je vais donc abréger. Cet homme est ce qu’on appelle un génie. Dessinateur de talent dès sont plus jeune age, il bosse dans une revue à 17 ans et y publie sa première bande dessiné. En parallèle de ça, vu qu’il a du temps libre, il poursuit ses études de médecine. L’après guerre lui est favorable car en 1947, il publie sont premier best-seller, « La nouvelle île aux trésor » vendu à 400 000 exemplaires. Il devient en plus de ses études er de son boulot de rédacteur, critique de cinéma avant de créer en 1952, le personnage que tout le monde lui associe aujourd’hui, « Astro boy ».
Cette œuvre est à elle seule un symbole. Déjà par l’utilisation du style « grands yeux » aujourd’hui utilisé dans une quantité mirifique de manga. C’est un hommage aux film de Walt disney dont Tezuka a toujours été admiratif. La popularité d’Astro a popularisé ce type de trait.

Mais c’est aussi et surtout une œuvre symbole d’espoir. Aujourd’hui, l’espoir ne veut plus dire grand chose pour la plupart d’entre nous. On espère avoir un travail, gagner de l’argent et être heureux. Mais essayez de vous mettre à la place d’un enfant japonais en 1952 alors que le pays a été ravagé par l’arme nucléaire et qu’il est occupé par les Etat-unis. Quel avenir imagineriez-vous ? L’avenir que Tezuka leur proposait était un avenir où la science est bonne mais dangereuse entre de mauvaises mains, où un petit robot aux traits enfantins est le défenseur de valeurs tel que la justice, le respect des autres et de la nature et où le bien triomphe, même si le combat n’est pas toujours simple. Tezuka a inspiré toute une génération d’enfants, aujourd’hui ingénieurs en robotique ou ayant des postes à responsabilité.

Mais révolutionner le manga avec des histoires poignantes, un découpage des scènes très cinématographique et un style simple mais technique ne suffisait pas (oui, cette phrase sert à dire que techniquement, il a aussi tout défoncé. C’est le père du manga moderne, telle qu’on le lit aujourd’hui).
En 1962, il fonde son propre studio d’animé et après de nombreuses recherches sur les techniques d’animation, il sera l’auteur de la première série animé à parution hebdomadaire : Astro boy. Il sera aussi l’auteur de la première série animé en couleur, le bien nommé « roi léo », dont il est l’auteur en manga. Les techniques développées à l’époque sont la base de l’animation actuelle, quand elles ne sont pas tout simplement des copier-coller. Vous commencez à réaliser le génie de l’homme et de l’équipe qu’il a formé/réuni ?

Son studio fait faillite mais renaitra sous le nom de « Tezuka production », aujourd’hui gardienne du patrimoine du monsieur. Il mourra suite à un cancer en 1989 et aura l’honneur d’avoir des funérailles nationales. Le Japon dans son entièreté a été capable de reconnaitre qu’il y a eu un avant et un après Tezuka dans le monde du manga et de l’animation.

Si Tezuka est le dieu du manga alors Shotaro Ishinomori en est le roi. Si il n’a techniquement rien révolutionné, il a su apporté des idées et des créations encore aujourd’hui marquantes et vivantes. Né en 1938 il créera en 1963 « Cyborg 009 », un manga dépeignant une équipe de héros cybernétiques avec des super-pouvoirs, une première au japon. Ca ne vous dit rien ? Alors peut-être que « Kamen rider » et « Sankukai » vous parlent plus, car c’est lui l’auteur des deux séries. Il a juste créé et popularisé les super sentai, créant des codes comme la transformation du héros après avoir pris une pose classe.

Bref, ce n’est pas pour rien que Tezuka l’a choisi comme « disciple » pendant 5 ans et le choix n’a pas été mauvais. Ishinomori a eu le record du plus grand nombre de publication pour un auteur, avec 128 000 page publiées. Créateur prolifique et visionnaire, il méritait de partager l’affiche de cette exposition avec Tezuka.

L’exposition… ça aurait pu être bien… c’est bien même ! Mais… elle m’a rappelé les heures les plus sombres de mon passage en Corée. J’y ai cru au début. A l’entrée, une grande présentation en japonais et en anglais sur les auteurs ainsi qu’un texte expliquant l’exposition, également traduit m’ont trompé. On retrouve ce type de panneaux à 3-4 autres endroits de  l’exposition, quand on change de thème ou d’époque donc, c’est cool ! Le problème, c’est qu’il n’y a rien d’autre en anglais. L’exposition rassemble des cahiers de notes, des planche originales ainsi que des illustrations, des vidéos de présentation, etc, rangés par ordre chronologique et toujours avec un peu de Tezuka et un peu de Ishinomori. Que les planches soient en japonais, je le comprends parfaitement. Mais que toute les explications autour ne soient pas traduites, c’est plus gênant, surtout qu’elles sont nombreuses et qu’elles doivent avoir leur importance. On se retrouve donc à naviguer d’une planche à l’autre, d’une illustration à l’autre, en passant totalement à côté de ce qu’elles représentent en terme d’avancées techniques ou en terme de symbolique. C’est dommage quand l’introduction de l’exposition nous montre clairement la portée internationale du média « manga », portée qui n’a pas d’équivalence dans les murs du musée.

Alors c’est cool quand même et ça intéressera beaucoup les férus de dessin ou les connaisseurs de ces deux auteurs mais en tant que simple amateur voulant parfaire sa culture, y’a comme un raté sur ce coup. Sans aller jusqu’à tout traduire, souligner l’importance d’une œuvre par rapport à une époque, pointer du doigt la performance technique de tel découpage, tel dessin et le remettre dans le contexte de l’époque aurait quand même pu être un plus par rapport à ce que l’on a actuellement.

J’ai quand même passé plus d’une heure et demi dans cette seule exposition, la preuve qu’il y a des choses à y voir mais c’est un sentiment de « raté » que je retiens en sortant des murs de « The Power of Manga : Osamu Tezuka and Shotaro Ishinomori »

Avec mon billet pour l’exposition temporaire, j’avais le droit de voir l’exposition permanente. Expo permanente d’art contemporain… je m’attendais a des trucs bizarres et là aussi, semi déception. Ok, y’a des tableaux tordus mais c’était dans l’ensemble que des tableaux. Pas de grandes sculptures étranges ou participatives par exemple. En comparaison, le musée de la Morii tower fait plus conceptuel. Le thème est la guerre, les catastrophes, la vision de soi par rapport aux autres, de soi vis-à-vis de soi bref que des trucs très philosophico-psychologiques.

Mais pour la première fois de ma vie, j’ai vu une œuvre que je serais capable d’acheter si j’étais riche. Un paravent représentant d’un côté une écolière japonaise en uniforme, portant un drapeau japonais et en face une écolière coréenne en uniforme, portant un drapeau coréen. Le dessin est magnifique, très terne et monochromatique mais il a une force incroyable.

Je ne regrette absolument pas cet après-midi au musée car c’était quand même intéressant. Ce que je regrette, c’est le manque d’accessibilité de l’information dans un domaine qui touche aujourd’hui aussi bien les japonais que les occidentaux. Une exposition sur des personnalités aussi renommées d’un média internationalement populaire se devait d’être plus abordable.

Si le cœur vous en dit, l’exposition fermera ses portes le 8 septembre alors à vous de voir si la limitation linguistique peut vous rebuter.

6 Réponses

  1. Qui est l’auteur du tableau représentant les écolières japonaise et coréenne ?

    • c’est Aida Makoto et l’œuvre s’appelle « Beautiful flag (war picture returns) »

      • Bon j’ai cherché sur gougoule image. Grave erreur (surtout au boulot) : outre les tableaux emplis de cadavres humains (thème de la guerre donc), l’artiste a vraisemblablement un goût prononcé pour la représentation de filles visiblement mineurs, jambes écartées, se prenant des choses dans les parties intimes ou pissant des perles rouges*.

        Moi qui m’attendais à voir une toile aussi frappante que son « Beautiful Flag », je suis un peu déçu.

        *http://31.media.tumblr.com/87f11b3bf3bdccb17c9ac40defed5668/tumblr_mhg4z7zboC1qfye6ro1_500.jpg

        • Disons que c’est pas le genre d’artiste qui fait pas de l’art contemporain pour rien quoi… Y’avais rien de tout ça dans l’expo… dommage ^^

  2. Mince moi qui te disait « tu fais tout pour échapper au musée » bah j’ai l’air fin la !!! Tsss !
    Bon l’expo tempo a changé depuis avril quand j’y étais allé, mais c’est vrai que dans les musées les expo tempo sont bcp moins traduites, voir pas du tout.
    Tu ne dis même pas un mot sur l’architecture du musée ? Je l’avais trouvé assez original avec l’entrée et l’immense hall avec quelques sculptures originales, le tout dans le même espace.
    Bon tu as fait ton quota « musée » pour le mois à venir ^^

    • Surtout que j’étais hier dans un autre musée pour une expo sur les Yokai et Ge ge ge no kitaro… oui comme mon article sauf que je ne savais pas qu’il y avait cette expo quand je l’ai écrit >_< Dans le hall, il n'y avait que la sculpture du mamouth que j'ia pris en photo et l'architecture ne m'a pas interpelé à vrai dire. C'est pour ça que j'en parle pas.

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